Mes amis m'ont offert un super livre sur l'histoire des courants du féminisme durant les XIX et XX siècle. Je le trouve d'autant plus passionnant que des nouveaux courants réactionnaires apparaissent aujourd'hui et se taillent une place dans les médias en se disant féministe, ce qui est évidement un contre sens. Et ce n'est pas sans me rappeler le premier cours où j'ai rencontrer le féminisme sans que le mot ne soit poser.
Je ne sais plus en quelle classe c'était mais j'étais au collège. C'était un cours d'histoire géographie, sur la transition démographique. Un élève s'était cru malin en parlant des "femelles" qui diminuaient leur nombre d'enfants dans un devoir à la maison. Il s'est retrouvé convoqué au tableau. Il a du expliqué la différence entre une femme et une femelle. Évidemment, ce n'était pas très clair dans sa tête sinon il ne l'aurait pas écrit. Alors la professeur nous a donné ce que je pense être notre premier cours de féminisme en nous l'expliquant. Elle nous a parler liberté de procréer bien évidement mais aussi liberté sexuelle, liberté affective, liberté d'orientation sexuelle, liberté financière, émancipation intellectuelle et probablement d'autres chose que je n'ai pas retenu. Pendant longtemps, je n'ai vu dans ce cours qu'un sermon individuel. Mais je crois qu'il est quelque part fondateur.
Aujourd'hui quand j'entends parler d'un courant "femelliste" dans le féminisme ça me hérisse. Ca me hérisse d'autant plus quand ses représentante sont reçues en grande pompe par la ministre de l'égalité (Aurore Bergé à l'époque). Je repense à cette professeur et je me demande comment le monde a-t-il pu tourner pour qu'aujourd'hui, les idées pas très formées d'un collégiens deviennent des idées politiques structurées et mises en avant ? Comment est-ce possible de passer de la défense du droit des femmes à la défense du droit des femelles ?
Je ne crois pas que ce soit une histoire de "montée" en puissance du droit des personnes transgenre à disposer de leur corps parce que dans les faits, ces droits sont très limitatifs. Il y a beaucoup plus de fantasmagories que de droits réels. Et les personnes qui ont déjà entamés ces procédures savent combien elles sont longues, aléatoires et parfois traumatisantes. Je ne pense pas que ce soit une question de visibilité non plus. Il y a toujours eu des personnes transgenres ou flirtant avec les normes de genre. Je vois cependant une invisibilisation d'une partie de l'histoire féminine qui est en marche. L'histoire des ouvrières et de leurs luttes est en train de disparaître au profit d'une histoire fantasmé où les femmes seraient retranchées à la maison avec les enfants. Même les salons littéraires féminins du siècle des lumières sont effacés au nom de la "redécouverte" de la littérature féminine. Mais la redécouverte de quelle type d'autrice par quel public ?
Je pense qu'il y a deux mouvements qui se télescopent et qui conduisent à mettre en avant des réactionnaires. D'abord il y a une lame de fond réactionnaire dans l'ensemble des sujets de société. Il y a un discours réactionnaire du "c'était mieux avant" fantasmé qui est massivement diffusé médiatiquement. Ce mouvement rencontre un autre mouvement plus pernicieux celui là. C'est un mouvement féministe au sens propre du terme mais qui est issus de la bourgeoisie éduqué et fait fie de l'histoire sociale hors de son propre groupe social. En gros, les suffragettes, ça passe parce qu'il est possible de s'y identifier mais les sardinières non. C'est là qu'il est question de "redécouverte" et de besoin "d'écriture de l'histoire" des femmes. Comme si des autrices comme Olympe de Gouge ou Louise Michel n'avait soudainement jamais écrit.
Je crois finalement que ce qui se perd est l'éducation populaire, bien plus que le féminisme. Je repense à une interview d'un syndicaliste étudiant (je ne me souviens plus lequel) d'il y a plus de vingt ans au sujet des réformes de l'éducation et de la mise en place du "socle commun de compétences". A l'époque il défendais l'idée que politiquement la massification de l'école était en train d'être abandonnée. Et ce socle commun de compétences en était le marqueur. Plutôt que de former des citoyens conscients et capable d'apprentissage, l'école se donnait pour objectif de former des ouvriers ayant un minimum de connaissances techniques utilisables immédiatement. Je pense que ce n'est pas seulement une question d'école mais aussi d'associatif. Je vois des associations exclure les mineurs de leur projets parce que "c'est tendu" vis à vis de certaines subventions. Je vois aussi des associations qui à l'inverse exclure certaines actions de leur projet pour garder leur action auprès des mineurs. Comme s'il fallait choisir entre l'éducation et les sujets de sociétés.
J'avoue que je ne sais pas quoi faire autant à titre individuel qu'à titre collectif. Expliquer ? Oui mais comment ? Et à qui ? Soutenir les luttes bien sûr. Dénoncer les biais aussi, surtout quand ils sont classistes. C'est déjà ça. Ou pas...