Handicap, santé et discriminations

Souvent quand je raconte certains de mes déboires administratifs, j'ai le doit à cette question ingénue "mais ils savent que c'est un critère de discrimination lié à la santé/au handicap?". Oui ils savent.
Et ils s'en moquent. Année après année, le défenseur des droits livre son rapport d'activité avec en tête des saisines les questions de santé et de handicap. Ca fait des articles marronniers dans les journaux, un peu comme la rentrée scolaire et les enfants qui pleurent en maternelle. Et puis le vent de l'actualité passe à autre chose. Un peu comme moi en quelque sorte. Et il y a deux raisons majeurs à ça.

La première raison est que si saisir le rapporteur des droits est facile et accessible, l'intérêt de la démarche est faible. Sur les presque 100 000 dossiers traités lors de l'année 2019, seul 4 ont donné suite à des saisines du parquet. La grosse majorité des dossiers (80%) aboutis à des réglements à l'amiable. 0,7% des dossiers donnent lieu à des recommandations non contraignantes et 0,3% à des décisions contraignantes.
1% de dossier vont jusqu'au bout... Il est possible de considérer cela comme une victoire de l'accord amiable. Mais il est encore plus probable qu'il n'y ai là qu'une marque de plus de l'épuisement des demandeurs face aux multiples démarches pour faire valoir leur droit. En quelque sorte, les décisions en demi-teinte y sont de bon ton.

La deuxième raison, je viens juste de l'évoquer. L'épuisement face à la machine administrative peut vite arriver. Si j'avais saisi le défenseur des droits, les prudhommes ou le tribunal administratif face à chaque discrimination manifeste, mon avocat serai devenu mon meilleur ami. Pourtant je l'ai consulté plusieurs fois parce que tout s'embrouillait dans ma tête entre le droit, la pratique habituelle et le franchement déconnant. A chaque fois, il m'a confirmé l'embryon de réponses juridiques qui m'était venu à l'esprit. Et à chaque fois, après des discussions parfois longues, la décision finale a été de ne rien faire. Pas parce que c'était juridiquement non pertinent mais parce que ça l'était socialement.
Quand le remède est pire que le mal, il faut soit accepter de se "sacrifier" pour faire un exemple, soit accepter de passer par dessus la discrimination. Le monde est violent fae à la question des discriminations et en particuliers celles liés à la santé et au handicap. Le "bon sens commun" ne les admet pas encore. S'il est devenu difficile de répondre "c'est normal, tu est noir/arabe/juif/..." face à une discrimination, il est encore très courant que la "faute" soit attribué au discriminé lorsqu'il s'agit de santé ou de handicap. La "placardisation" apparaît toujours comme normale pour les personnes en situation de handicap ou de retour de longue maladie. Je ne compte plus les fois où il m'a été répondu que le fait d'être en fauteuil était incompatible avec le fait d’accueillir du public.

Alors oui, ils savent comme ils savent la plus grande vulnérabilité juridique des personnes malades ou en situation de handicap. Et ils en profitent parce que beaucoup, comme moi, sont épuisé rien qu'à l'idée de dénoncer leur pratique.

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