Je viens de temps en temps sur Paris pour des raisons professionnels ou
personnels. Mais jusque là, j'avais toujours été hébergé à l'intérieur du
périphérique et la question des transports se limitait à "comment fait-on pour
prendre le bus?" Quand je suis sur Paris pour plusieurs jours, je suis souvent
en fauteuil. Ca me permet de ne pas être limiter dans mes déplacements. En un
quart d'heure à pied, je fait beaucoup de chose dans Guéret. En un quart
d'heure à pied, je ne fait pas grand chose à Paris (limite même pas les
courses).
Cette fois-ci j'étais loger en banlieue et j'ai expérimenter matins et soirs
pendant 3 jours le RER en mode PMR. En théorie c'est simple, sur les lignes C,
D, E, il suffit de se présenter à l’accueil et de dire où on veut aller. Sur
les lignes A et B, la procédure est différente si il s'agit de la zone SNCF ou
de la zone RATP. Si c'est la zone RATP, c'est pareil que sur les 3 lignes
précités. Sinon il faut faire comme sur les trains grandes lignes et appeler la
plateforme de réservation 48h avant. Du coups mon trajet retour a été différent
de mon trajet aller parce que pour une formation qui potentiellement termine
pas à l'heure prévue et avec une correspondance de bus, je suis pas capable de
savoir pile poil nikel 48h à l'avance quel RER je vais prendre. C'est donc plus
pratique de rester en zone RATP.
Après la théorie du "bonjour, je veux monter dans le RER" et pouf, je monte
dans le RER, c'est franchement de l'affichage... Déjà dans les grandes stations
comme Châtelet, il faut trouver un guichet ouvert, ce qui n'est pas toujours
gagner d'avance. Parfois, il faut rentrer dans la station pour chercher un
autre guichet parce que celui par lequel on arrive est fermé. Après, il faut
être "programmé" pour pouvoir monter dans le RER : ce qui implique que la
gare de départ, la gare d'arrivée et le central qui gère la ligne soit tous
d'accord sur quel RER j'ai envie de prendre. Un matin, il y a fallu un peu
s'imposer parce qu'ils avaient décider que j'allais attendre une heure en tout
en regardant passer deux RER. Normal quoi... Il faut donc prévoir au moins un
bon quart d'heure entre l'arrivée en gare et le RER visé. Ensuite il y a les
oublis de rampes. Dans la théorie, un agent de la gare de départ met en place
la rampe pour monter dans le RER et un agent attend à la gare d'arrivée pour
mettre en place la rampe pour descendre. La pratique fait qu'il arrive que
l'agent de la gare de départ "loupe" le RER et que l'agent de la garer
d'arrivée ne soit pas là au moment prévu. Dans ces cas là deux solutions :
- moi j'ai de la chance, je suis en fauteuil manuel et les chauffeurs peuvent
m'aider à monter et descendre sans rampe et sans impact sur le trafic - la
version "pas de bol" est d'être en fauteuil électrique. Deux personnes se sont
retrouvés bloqués dix bonne minutes en heure de pointe dans mon RER à attendre
que l'agent RATP veuille bien se bouger pour qu'ils puissent descendre. Porter
un fauteuil de 150kg minimum est juste impossible. Pour préciser, si mon RER
est bloquer en gare, il bloque tout ce qui est derrière lui. La classe non?
Bloquer la ligne B le soir parce qu'il y a des fauteuils qui veulent descendre.
J'ai aucune idée de ce qu'ils racontent aux voyageurs. Ca doit rentrer dans les
"incidents de trafic" ou les "régulation de trafic" Mais il y a quand même une
vraie liberté à se retrouver dans l'avant dernier RER à minuit moins cinq en
pleine semaine après avoir dîner au restaurant dont celui de ne pas se poser la
question d'y aller ou pas pour des bêtes questions de transports.
L'accessibilité a encore de très gros progrès à faire, il ne faut pas se voiler
la face. La moindre sortie reste un parcours d'obstacle mais il y a des choses
possibles pour peu qu'on soit doter d'un solide sens de l'humour. J'avoue que
le serveur qui propose d'aller au WC en 2016 peut paraître surprenant mais
quand il s'agit de m'expliquer qu'il n'y a pas de WC handicapée apparemment
c'est une réponse tout à fait normale... Je vais éventuellement camper dans un
restaurant pendant deux ans pour aller au WC. J'espère qu'ils ont aussi prévu
de créer des douches en même temps parce que sinon ça va être un peu light.
Mais à part ça, j'ai bien manger et il y avait pas de marche à l'entrée.
Mais les plus gros progrès reste quand même dans le domaine du civisme. Dans ce
domaine là, les femmes ayant une poussettes et prenant le bus tiennent le haut
du pavé. Je comprend tout à fait qu'on puisse avoir un ou plusieurs enfants en
bas âge et avoir besoin de prendre le bus mais ce n'est pas une raison pour
perdre tout esprit critique. Je ne suis pas particulièrement épaisse mais j'ai
appris que je gênais dans le bus parce que j'étais "plus large qu'une poussette
pour jumeau". Je penserai à me plier un peu la prochaine fois qu'une poussette
large montera dans le bus. Autre trouble régulier de la mère à poussette, le
cri hystérique au moindre mouvement suspect : je suis en fauteuil, je suis
donc un danger public visant spécifiquement la mignonne petite chose protégé
par la fragile structure de la poussette. Autrement dit mon but ultime est de
leur rouler dessus. J'adore estropier des mômes ne sachant pas ou sachant à
peine marcher juste pour qu'eux aussi puisse plus tard connaître le bonheur du
fauteuil. Plus sérieusement. Un bus bouge et est très rarement plat. Quand je
retire mes freins il est rare que le fauteuil reste parfaitement immobile.
Quand il y a des poussettes surnuméraires, qui sont donc entre la porte et moi,
ça pose souvent problème. Personnellement, je trouve ça ridicule. Il n'y a pas
plus de raison que j'estropie quelqu'un qu'une poussette estropie quelqu'un.
Mais les préjugés on la vie dure. Je me venge en apprenant des grimaces aux
mômes dans les poussettes. Je suis à la bonne hauteur et c'est marrant. Le
fléau numéro deux, je ne sait même pas d'où il vient. Il arrive par derrière
sournoisement et me fait perdre tout contrôle sur ce que je fait. Je ne
comprend pas ces gens là. Je me déplace la plupart du temps plus vite que la
plupart des gens. Je suis moins rapide dans les pentes ou dans les dévers mais
je ne suis pas non plus en grande difficulté. Mais il y a quand même des
personnes qui se pense autorisées à saisir les poignées du fauteuil et à me
pousser sans même s'inquiéter de savoir où je vais. Je ne suis pas un paquet en
libre service... Autant je comprend les gens qui me propose de l'aide (que je
sait parfaitement refuser poliment) autant je ne comprend absolument pas les
gens qui me surprennent en s'emparant par surprise de mon moyen de déplacement.
Je n'ai pas des yeux dans le dos (comme tout le monde quoi) et généralement je
m'en rend compte parce que tout d'un coups quoi que je fasse sur les mains
courantes, je ne maîtrise plus rien. Pour les piétons, ce serait comme se
retrouver encadrer par quatre personnes l'obligeant à adopter un rythme de
marche et une direction précise. C'est pour le moins frustrant pour ne pas dire
aliénant. Le pire est que quand je m'énerve, la plupart des auteurs de ce
comportement se défendent en m'expliquant que c'était "pour m'aider".
J'aimerais bien que le monde accepte que les personnes en fauteuil n'ont à
priori pas besoin de plus d'aide qu'une personne lambda et que dans tous les
cas, elles ont tout autant capable de demander de l'aide que n'importe qui. On
n'impose pas son aide à une personne sous prétexte qu'elle parait en difficulté
du fait d'un handicap visible. Dans tous les cas c'est une proposition et une
personne handicapée qui refuse va très bien. C'est elle qui est le mieux à même
de savoir si elle est en capacité de faire ou pas.