Il y a quelque temps, je discutais avec un collègue qui ne comprenais pas
pourquoi la reprise de la marche avait été si difficile pour moi sur le plan
psychologique. En fait, je crois que c'est une constante du changement. Lorsque
le quotidien est mis en place, il est difficile de la bousculer entièrement.
C'est d'autant plus vrai quand il s'agit de la santé.
J'ai eu du mal à accepter de me déplacer en fauteuil et à organiser mon
quotidien autour de ça. Autant que j'avais eu du mal à organiser mon quotidien
autour de mon épilepsie rebelle. Et puis je m'y suis faite. J'ai accepter ces
"non choix".
Je crois surtout que j'ai eu du mal à accepter mes nouvelles capacités, parce
qu'elle venait heurter ma conception de ce qu'était "aller mieux". Je suis
toujours malade chronique et de ce coté là, ça ne va pas mieux. Par contre j'ai
moins de limitation physique ce qui globalement pourrai diminuer mon handicap
s'il n'y avais pas la lourdeur et la complexité de mon traitement. J'ai
échanger des limitations physiques contre des contraintes médicales et des
effets secondaires. C'était et c'est toujours un pari. Pour l'instant je
m’accommode du résultat mais avec le temps, ça pourra changer.
Au bout d'un an et demi de psychomotricité, je me suis libérer de la peur de la
chute et de la peur de ne pas tenir la distance. Mais ça a été compliqué. Se
mettre debout sans être sur que le corps va le supporter est extrêmement
anxiogène. Et c'est cette peur là qui m'a fait plonger. Tout mon quotidien
était réglé pour que je puisse en faire le maximum assise et pour le reste, je
gardait au moins un appui. Je ne me mettait debout qu'appuyer sur quelque
chose. J'ai mis longtemps à passer de l'étape "ah ouais je peux faire ça aussi"
en rééducation à l'étape d'application dans mon quotidien. La peur de la chute
me bloquais dans tous les sens du terme. Elle me bloquais par réelle peur de
tomber mais aussi parce que j'avais peur de "rechuter" de repartir dans l'autre
sens. Maintenant que ça fait un an, que ce n'est plus aussi frais dans mon
esprit je comprend ce qu'il se passait. J'avais peur d'être déçu, de perdre le
pari médical. Je me posais milles questions et en particulier celle de ce que
les gens que je côtoie penserai de moi. Ca m’angoissais de devoir expliquer un
truc que je ne maîtrise pas vraiment, c’est à dire aller visuellement mieux
alors que ça ne va pas mieux. C’est en particulier dans mon travail que la
question se pose. Dans ma tête, quand j’ai repris, je faisais six mois à
mi-temps et je revenais à 80 % comme avant. Mais la fatigue coince et je
suis toujours à mi-temps. Ca fait partie d’en ensemble de petites choses pour
lequel je dois toujours aménager mon quotidien. Je progresse au niveau des
angoisses mais il y a encore des choses compliquées qui me bouffe mon
énergie.
Je crois vraiment que si je devais faire le bilan de ces deux dernières années
beaucoup de chose on bougé mais globalement c’est pareil. Je suis toujours
aussi handicapée dans ma vie courante. C’est juste un « échange »
d’incapacité. J’ai gagné en confort dans mes déplacements mais ça ne fait pas
tout un quotidien.